TOUT LE MONDE EN PARLE : “NFT : WTF ?”

TOUT LE MONDE EN PARLE : “NFT : WTF ?”
(par Anne-Isabelle Legouy)

Quel est le point commun entre un chat volant en 2D et un tweet ? La réponse : quelques millions de dollars et un acronyme dont tout le monde parle : NFT. Non-Fungible Token. Une technologie basée sur la blockchain et qui permet de certifier la propriété d’un bien.

Tel qu’on en parle aujourd’hui, on peut légitimement se demander si les NFTs n’appartiennent qu’à une sphère de multi-millionnaires en quête d’investissements plus absurdes les uns que les autres. Bien évidemment, non. Cette technologie est loin d’être si limitative.

LightMeUp revient donc aujourd’hui sur ce que sont les NFTs et sur quelques utilisations qui laissent entrevoir un avenir plus équilibré pour cette nouvelle technologie.

Mais avant cela … qu’est-ce qu’un NFT, et quel est son lien avec la blockchain ?

Non-fongi...quoi ?

Pour comprendre la notion de NFT, regardons la signification des termes qui la composent : non-fungible tokens. En français, on parle de jetons non-fongibles.

Un bien fongible, qu’est-ce que c’est ? Les biens fongibles sont tout simplement des biens catégorisés par une appartenance à une même nature, genre ou espèce, et qui, de fait, peuvent être échangés aisément. La monnaie est donc un bien fongible, tout comme le riz, ou encore un anorak d’une quelconque marque. Le bitcoin est également un bien fongible.

Un bien qui n’est pas fongible serait donc un bien unique en son genre qui ne pourrait pas être échangé contre un autre. L’exemple le plus parlant d’un bien non-fongible est une œuvre d'art.

Un tableau de Picasso est donc un bien non-fongible.

En reprenant l’exemple de l’anorak, on peut même étayer cette définition. L’anorak en tant que tel, sur le site internet de la marque, est un bien fongible. Peu importe celui que je commande, et celui que je recevrai, il est identique à la multitude de ceux produits par la marque. En revanche, une fois acheté, peut-être vais-je m’y attacher et y accorder une valeur sentimentale particulière, parce que je l’aurais porté à certaines occasions, et vivrais avec, des moments forts. Il deviendrait unique par la valeur que je lui accorderais, et à ce titre, si j’en recommande un autre il ne sera pas exactement comme celui-là : il n’aura pas la même valeur.

Vous voyez où nous voulons en venir ? La notion de bien non-fongible est étroitement liée à la valeur que cet objet a et à la valeur qu’on lui donne.

Qu’en est-il de la notion de “token” ou de jeton ? On parle de tokens comme des unités qui s’échangent à travers la technologie de la blockchain. Le jeton est donc ce que va posséder l’acheteur de ce “bien fongible” dont nous parlions et qui certifie qu’il en est le propriétaire.

Quel est le lien avec la blockchain ?

Parfait ! On arrive à cette fameuse technologie de la blockchain. Pour comprendre rapidement de quoi il s’agit, le Youtubeur Hasheur nous donne un exemple particulièrement parlant.

Quatre personnes se trouvent dans une pièce, autour d’une table. Sur un livre, ils retracent l’ensemble des événements qui se déroulent dans la salle en temps réel : une personne ouvre la fenêtre, une autre boit un verre d’eau, etc. A chaque événement relaté, tous les protagonistes présents dans cette salle se réunissent et certifient que ce qui est inscrit dans le livre est correct et conforme. Une fois le fait inscrit dans le livre, on ne peut pas revenir en arrière et modifier ce qui a été écrit.

La blockchain est donc une technologie de stockage d’informations sécurisée par sa propre communauté. Son utilisation la plus connue s’illustre avec les crypto-monnaies, notamment le Bitcoin. Les NFT fonctionnent également grâce à elle. Pour l’heure, il s’agit presque exclusivement de la blockchain nommée Ethereum.

Le concept est simple. Même s’il n’y est pas limité, il se comprend bien avec le marché de l’art : un artiste va mettre une œuvre sur la blockchain par un processus sécurisé et validé par toute personne qui fait partie de la blockchain. Si elle est revendue, l’origine de l'œuvre pourra être retracée, et son authenticité vérifiée.

Le concept existait déjà en 2012 sur la blockchain Bitcoin avec les coins colorés. En 2017, il a connu un essor avec les cryptokitties - des chatons à collectionner - sur la blockchain Ethereum. Aujourd’hui, les NFTs explosent principalement dans le marché de l’art et soulèvent deux axes de critiques.

Pourquoi en entend-on parler aujourd’hui et quelles sont les principales critiques qu’on en fait ?

Le premier axe est bien sûr éthique et porte sur les ventes extravagantes qui ont eu lieu récemment. Vous vous rappelez du chat en 2D dont on vous parlait tout à l’heure ? Vous savez, ce GIF d’un chat pixelisé qui vole dans le ciel en laissant un arc-en-ciel derrière lui. Il a été vendu 500 000$ sous forme de NFT. Le tweet, dont nous parlions également, est celui du CEO de Twitter qui a été vendu 3 millions de dollars. Bien plus vertigineux encore, une œuvre numérique de l’artiste Beeple a été vendue 69 millions de dollars. Soixante-neuf-millions de dollars ! Oui, c’est plus que vertigineux et oui, cela laisse perplexe.

Le deuxième axe de critique est environnemental. La technologie de la blockchain est sécurisée par un système de “Proof of work”. A chaque transaction effectuée sur la blockchain, le serveur des utilisateurs doit résoudre une série de calculs. La résolution de ces énigmes permet aux utilisateurs, appelés aussi "mineurs", d'ajouter un nouveau "bloc" de transactions vérifiées. En contrepartie, l’utilisateur reçoit une récompense. La résolution de ces micro-calculs nécessite que ces serveurs tournent en continu. En conséquence, Ethereum consommerait aujourd’hui autant d’électricité qu’un pays de la taille de la Belgique.

Conscient de cet impact énergétique plus que conséquent, la plateforme Ethereum s’engage à réduire de 99,95% sa consommation d'électricité sur les mois à venir en mettant en place une solution alternative au système de “proof of work” actuel.

Ces deux axes de critiques semblent présenter l’industrie des NFTs comme une bulle dorée spéculative et désastreuse pour l’environnement. Et à juste titre. Néanmoins, peut-on réellement s’en arrêter là ?

Quel avenir pour les NFT ?

Plusieurs utilisations actuelles laissent présager un avenir certain pour les NFTs. Quelles sont-elles ?

Une façon de collectionner 2.0

Les collectionneurs peuvent se réjouir d’un nouvel horizon que leur offre l’industrie des NFTs. Nous parlions tout à l’heure des cryptokitties, ces petits chatons que l’on collectionne. Au-delà de les collectionner, on peut également les connecter entre eux pour en obtenir un autre, issu de cette connexion et détenir une collection unique et diversifiée.

La recherche de la rareté, propre au fait même de collectionner, peut être approfondie dans l’univers novateur des NFTs. Une œuvre est-elle rare parce qu’elle est innovante ? En ce sens, être le premier à vendre son tweet sous la forme de NFT est innovant. Détenir ce tweet est rare. Une oeuvre est-elle rare parce qu’elle va me donner accès à des avantages inédits ? Par exemple, je vais acheter une oeuvre car elle va me permettre de rencontrer l’artiste dans un espace virtuel. Est-elle rare car elle iconique ? Par exemple, je vais acheter un moment clef de l’histoire du basketball en “achetant” un panier de Lebron.

Certaines plateformes ont d’ailleurs capitalisé sur cette recherche de la rareté en faisant des classements des NFTs les plus rares. Ainsi, la plateforme rarity.tools établit des scores de “rareté” à partir de plusieurs facteurs. Cette plateforme a vocation à guider les utilisateurs dans leur d’investissement.

Enfin, nous parlions tout à l’heure du marché de l’art. Les collections d'œuvres d’art n’ont pas nécessairement vocation à être revendues pour des sommes astronomiques : on peut tout à fait imaginer une nouvelle façon d’exposer ses collections. A ce titre, la plateforme Terra Virtua développe un musée en réalité virtuelle pour exposer tous les NFTs qu’un collectionneur possède.

La notion de traçabilité

La notion de traçabilité est l’un des intérêts primordiaux de la technologie de la blockchain. L’idée est de pouvoir retracer aisément toute la chaîne de transactions ou d’opérations effectuées depuis la création de la blockchain. Au-delà de l’utilisation dans le cadre des crypto-monnaies, on a vu Carrefour s’en saisir pour rassurer ses consommateurs sur l’origine de ses produits.

Du côté des NFTs, la traçabilité trouve également son intérêt. Acquérir une œuvre peut être d’autant plus motivé que l’on sait qui l’a possédée auparavant.

La propriété de biens numériques seulement ?

La principale fonction du jeton non-fongible est de certifier la propriété d’un bien. Aujourd’hui, ce bien est principalement numérique. Mais on peut parfaitement imaginer que la blockchain serve à sécuriser la propriété d’un bien physique comme une voiture, ou un appartement.

J’achète un appartement et peut y entrer grâce à un système de sécurité mis en place par la blockchain et accessible depuis un objet connecté, comme mon téléphone.

Créer et entretenir un lien avec sa communauté

Au-delà de la certification de la propriété d’un bien, on pourrait également y voir une manière pour un artiste, auteur, créateur de contenu de créer un lien privilégié avec sa communauté.

Un exemple nous a particulièrement marqué.

En mai dernier, l’entrepreneur Gary Vaynerchuk avait lancé une collection de NFT nommée VeeFriends. Cette collection contient plus de 10 000 dessins qui sont vendus entre 50 000$ et 100 000$ l’unité. L’achat d’un token permet non seulement la propriété de l’oeuvre originale mais également l’entrée dans la communauté VeeFriends. De plus, l’acheteur a accès pendant trois ans à VeeCon : une conférence de plusieurs jours sur le thème du marketing, entrepreneuriat, créativité etc. Au-delà d’une simple collection de dessins, Gary Vaynerchuk veut fidéliser et récompenser intelligemment sa communauté. Et il ne s’arrête pas là !

En août dernier, il annonçait la publication de son nouveau livre Twelve and a Half ainsi qu’une surprise à la clef pour les futurs lecteurs de son livre : pour 12 livres achetés sur une période de 24 heures, un NFT est offert ! Sur les 24 heures en question, ce n’est pas moins de 1 millions de commandes qui ont été faites. Cette opération marketing sans précédent a classé le livre dans le top des ventes Amazon dans plusieurs pays, notamment aux Etats-Unis, au Canada et en Australie.